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Tuesday, April 25, 2023

Comment «STAT» et «Indéfendable» ont changé la donne en télé - Le Devoir

Les audiences de la télévision traditionnelle sont en continuelle baisse, mais, paradoxalement, jamais autant de Québécois n’ont été rivés devant leur petit écran à 19 h chaque soir. Le succès retentissant des quotidiennes STAT et Indéfendable déroge à toutes les tendances que l’on observe depuis des années dans l’industrie. Un phénomène qui étonne, mais qui compte aussi son lot de détracteurs.

STAT ou Indéfendable ? La question était sur toutes les lèvres en septembre, quand, pour la première fois, TVA programmait une série de fiction quotidienne à la même heure que celle de Radio-Canada. Mais alors que s’achève la saison télévisuelle, tout le monde ressort finalement gagnant de cette fausse rivalité, montée en épingle par tout le battage médiatique autour des deux productions.

STAT et Indéfendable dépassenttoutes deux largement le million de téléspectateurs chaque soir, selon les données préliminaires. Non seulement les deux téléromans sont, et de loin, les émissions les plus populaires en semaine à la télévision traditionnelle, mais ils ont aussi beaucoup de succès en rattrapage.

« Les quotidiennes sont un genre télévisuel intéressant, car la plupart des gens les écoutent en direct. On peut rattraper les quatre épisodes à la fin de la semaine. Mais ça reste qu’il faut les consommer rapidement pour ne pas prendre trop de retard. Alors que, pour les séries lourdes, les gens peuvent attendre beaucoup plus longtemps avant de les regarder, ce qui fait que ça ne paraît pas nécessairement dans les cotes d’écoute », explique André Béraud, premier directeur des émissions dramatiques et des longs métrages à Radio-Canada.

Tendance inverse

Les fameuses cotes d’écoute demeurent le nerf de la guerre tant pour TVA que pour le diffuseur public, qui mise sur une quotidienne en début de soirée depuis 1991. Marilyn, Virginie ou 30 vies récoltaient des cotes d’écoute honorables entre 19 h et 19 h 30, mais en deçà de ce à quoi nous ont habitués District 31 puis STAT à partir de 2016 dans la même case horaire. En 2006, par exemple, en plein âge d’or de la télévision linéaire, Virginie ralliait quelque 850 000 téléspectateurs, contre une moyenne de 1,3 million pour STAT, malgré la concurrence des Netflix et Disney+ de ce monde.

C’est tout le contraire de ce qu’on observe dans le reste de la grille horaire. Les créneaux de 20 h et de 21 h, autrefois les plus prisés en télévision, ont vu leur audience s’éroder depuis l’apparition des plateformes d’écoute en continu. Aucune émission ne dépasse le million en semaine, outre STAT et Indéfendable.

Et à première vue, le succès de ces deux séries ne se fait pas sentir dans le reste de la programmation. « Les gens n’ont plus le réflexe de syntoniser une chaîne et d’y rester toute la soirée », avance Stéfany Boisvert, professeure à l’École des médias de l’UQAM.

À TVA, le talk-show La tour a plongé sous la barre des 400 000 téléspectateurs dans les dernières semaines. Une audience particulièrement basse pour la chaîne la plus regardée au Québec, qui a annoncé en février que l’émission animée par Gildor Roy n’était pas reconduite pour l’automne prochain.

On serait tenté de conclure que le succès monstre d’Indéfendable n’a pu tirer vers le haut La tour, programmée stratégiquement après la quotidienne, à 19 h 30, dans la grille horaire de TVA. Mais Nathalie Fabien, directrice principale des chaînes et de la programmation au Groupe TVA, préfère inverser ce raisonnement. « C’est une vérité de La Palice de dire que l’audience a baissé en télévision. Personne ne peut dire le contraire, et tous les diffuseurs y sont confrontés. Dans ce contexte, TVA ne s’en tire pas si mal. Si l’audience totale se réduit, on a quand même réussi à augmenter nos parts de marché cette année. Si on n’avait pas eu Indéfendable, l’audience aurait peut-être encore plus baissé », suppose-t-elle.

La « saucisse » populaire

Certains relativisent le succès des deux quotidiennes. Dans une entrevue cet hiver à la station FM93 de Québec, la comédienne Julie Le Breton n’y est pas allée de main morte en parlant de STAT et d’Indéfendable, qu’elle a qualifiées de « saucisse », après avoir laissé tomber que « ça nivelle par le bas » la télévision québécoise.

« [Les diffuseurs] espèrent que les gens vont rester accrochés après. Ils vont regarder ça pis ils vont [re]garder toute la programmation de la soirée à ce poste-là. Ce n’est pas ça qui se passe ! Les gens regardent ça pis après ils vont “checker” sur Netflix pis sur Prime », avait-elle renchéri.

L’opinion de l’actrice vedette n’est pas partagée par tous, mais on lui accordera que STAT et Indéfendable sont effectivement tournés à la vitesse grand V avec des moyens assez modestes. Sur le plateau, les acteurs ont en effet peu droit à l’erreur. La réalisation est somme toute assez classique, et les intrigues peuvent mettre du temps à se déployer.

Pourtant, on sait que, sur les plateformes, les Québécois sont friands de séries étrangères à grand budget, qui adoptent au contraire un style cinématographique et un rythme effréné. Comment peut-on enfiler les épisodes de Squid Game ou de The Last of Us et, en même temps, suivre chaque soir une quotidienne filmée principalement en studio ?

« Ce sont des séries qui répondent à des besoins différents. Sur les plateformes, la tendance est aux séries courtes qui ont très peu d’épisodes, et les gens écoutent très rapidement. Alors c’est normal qu’il se crée un besoin contraire pour des séries que l’on va suivre sur une longue période, avec des personnages auxquels on va s’attacher et qui vont s’immiscer dans notre quotidien. En plus, le rythme lent de STAT et d’Indéfendable rend possible une écoute légère quand on est dans les transports en commun ou quand on est en train de souper, contrairement aux séries plus lourdes, qui demandent toute notre concentration », constate Stéfany Boisvert, dont les travaux universitaires portent sur l’industrie de la télévision.

En dépit des critiques, l’avenir sourit aux quotidiennes, toutes deux renouvelées d’ailleurs pour l’automne. Non seulement elles rallient un nombre impressionnant de téléspectateurs, mais elles ont aussi le mérite d’atteindre un auditoire un peu plus jeune que la moyenne, une qualité qui vaut de l’or aux yeux des publicitaires.

La moyenne d’âge des téléspectateurs à Radio-Canada est de 55 ans, un chiffre qui se rapproche plutôt de 50 ans pour STAT.

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