L’automne dernier, en pleine deuxième vague de l’épidémie de COVID-19, Magalie Lépine-Blondeau nous avait confié qu’elle s’ennuyait de tout : voyager, serrer ses proches dans ses bras, jouer… Douze mois plus tard, la jeune femme de 39 ans paraît comblée. Et pour cause. Bien qu’elle n’ait pas encore repris l’avion pour assouvir son désir d’aventures, elle a profité des vacances estivales pour faire le plein de famille et d’amis. Surtout, elle a renoué avec quelque chose dont elle s’était languie : son métier.
En juin, après 15 mois d’inactivité, Magalie Lépine-Blondeau a repris le travail en cinquième vitesse, en commençant à tourner non pas dans une, mais dans deux nouvelles productions durant la même semaine : La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé, la première série télé de Xavier Dolan, et Sans rendez-vous, une comédie pour adultes qui atterrira sur l’Extra d’ICI Tou.tv jeudi.
« J’étais très, très nerveuse, raconte la comédienne en entrevue. Je m’étais mis beaucoup de pression… Et finalement, ça s’est super bien passé. Ce matin-là, c’est comme si j’avais retrouvé mon grand amour. »
Après avoir connu une première année pandémique en montagnes russes, riche en questionnements, Magalie Lépine-Blondeau croit – ou ose espérer – être devenue une meilleure actrice.
J’ai un peu plus de vécu, je suppose. Et j’avais tellement soif de jouer ! Je n’ai jamais, jamais été blasée, mais j’avais retrouvé une sorte d’émerveillement. Tous les jours, j’étais comme fascinée d’observer mes collègues travailler. Il y avait quelque chose de magique, comme quand je rêvais de faire ce métier plus jeune.
Magalie Lépine-Blondeau
Parfum de scandale ?
Magalie Lépine-Blondeau nous a donné rendez-vous devant l’église Saint-Viateur d’Outremont. Une fois assise au soleil, histoire d’attraper les derniers rayons de l’été, la comédienne indique qu’elle mourait d’impatience de jouer Sarah, l’infirmière-sexologue au cœur de Sans rendez-vous. Après tout, Radio-Canada avait annoncé sa mise en chantier en grande pompe en octobre 2019. Initialement prévus au printemps 2020, ses tournages avaient été repoussés en raison des mesures sanitaires strictes, qui empêchaient le moindre rapprochement devant l’objectif.
Écrite par Marie-Andrée Labbé (Trop) et inspirée d’une websérie australienne intitulée Sexy Herpes, cette série compte effectivement plusieurs scènes de (grande) proximité. On pouvait difficilement y échapper, puisqu’elle relate, au moyen d’images explicites et d’un vocabulaire souvent cru, les tribulations des patients – et parfois des employés – d’une clinique de santé sexuelle de Montréal.
Malgré tout, Magalie Lépine-Blondeau ne croit pas que le public de Radio-Canada criera au scandale. Du moins, ce n’est pas ce qu’elle ferait comme téléspectatrice.
« Je suis très attachée aux thèmes qu’on aborde. Ce sont des thèmes qui font partie des conversations que j’ai avec mon entourage depuis des années. C’est sûr qu’il y a une volonté de briser des tabous, mais ce n’est jamais fait avec l’objectif de provoquer. Au contraire. Il y a beaucoup d’humour, de tendresse et d’empathie. On parle beaucoup de sexualité, mais pour moi, c’est une série sur l’intimité. »
Estime réciproque
L’enthousiasme avec lequel Magalie Lépine-Blondeau discute de Sans rendez-vous n’est pas feint. Derrière ses verres fumés, on voit son regard s’illuminer aussitôt qu’elle parle des textes « inclusifs » et « bienveillants » de Marie-Andrée Labbé.
L’estime est réciproque. Jointe au téléphone, l’auteure qualifie l’actrice de « merveilleuse surprise ».
Magalie est une femme très, très intelligente. Elle sait lire un texte. Elle est capable d’identifier les nuances. C’est quelqu’un qui met la barre haut. En tant que scénariste, c’est très motivant.
Marie-Andrée Labbé, auteure
Quand elle regarde les premiers épisodes de Sans rendez-vous, Marie-Andrée Labbé constate la vitesse avec laquelle Magalie Lépine-Blondeau a compris l’essence du personnage dont elle a hérité.
« Sarah n’est pas quelqu’un de flamboyant ; c’est quelqu’un de vulnérable. Elle n’est pas parfaite, mais elle fait son gros possible. La proposition de Magalie était audacieuse et généreuse. Ça fait en sorte que Sarah devient très attachante très rapidement. »
Son mot à dire
Si Magalie Lépine-Blondeau a autant aimé son expérience sur Sans rendez-vous, c’est aussi parce qu’elle avait son mot à dire.
Fabienne [Larouche, la productrice], Patrice [Ouimet, le réalisateur] et Marie-Andrée m’ont fait sentir que cette série m’appartenait aussi. Ça m’a aidée à m’approprier le projet. Ça fait du bien parce que parfois, comme acteurs, on n’est presque pas consultés durant le processus créatif. Mais après, c’est nous qui devons défendre le projet publiquement.
La comédienne a notamment élaboré le look de Sarah. Celle qui porte des talons au quotidien (résultat de 15 ans de ballet) imaginait davantage son personnage en souliers plats.
« Je voulais qu’elle soit groundée, explique-t-elle. Ça peut avoir l’air d’un détail, mais ça a complètement changé ma démarche. Et pour les scènes d’intimité, c’était vraiment important pour moi qu’elle porte un soutien-gorge beige de menstruation, comme ça arrive souvent aux filles. C’est quelque chose que j’avais envie qu’on voie à l’écran. Parce que souvent, pour qu’on se sente en confiance et jolie quand on tourne ce type de scènes, on nous choisit des sous-vêtements affriolants. »
Des scènes d’intimité
Magalie Lépine-Blondeau n’a pas souhaité qu’Aetios, la boîte de production de Fabienne Larouche et Michel Trudeau, retienne les services d’un « coordinateur d’intimité » lors des tournages de Sans rendez-vous. Il s’agit d’un poste de plus en plus répandu au sein des productions américaines, particulièrement depuis l’arrivée du mouvement #metoo. Chargée de chorégraphier les séquences plus olé olé, cette personne veille au respect des limites des acteurs.
« On m’a demandé si j’en voulais un, mais je n’en sentais pas nécessairement le besoin, révèle la comédienne. Peut-être parce que je devais jouer ces scènes d’intimité avec d’autres actrices… Je ne sais pas. Mais je sais que j’étais beaucoup plus en confiance qu’avec des hommes. Entre femmes, on s’entendait bien, on communiquait beaucoup. Et puis, on avait toutes déjà connu des expériences de tournage plus ou moins confortables. On était donc très solidaires. »
Peu importe sa décision, Magalie Lépine-Blondeau se réjouit de constater qu’au Québec, les producteurs commencent à engager des coordinateurs d’intimité lorsque le contexte s’y prête.
Le respect et l’intégrité physique et psychologique des artisans qui participent au tournage d’une série, c’est important.
Magalie Lépine-Blondeau
Sens des priorités
Force est d’admettre que la Magalie Lépine-Blondeau de 2021 s’ennuie beaucoup moins que celle de 2020. Elle n’a peut-être pas repris sa vitesse de croisière d’« avant », mais elle n’a pas moins de plaisir pour autant.
« Le temps me manque. J’ai l’impression qu’il nous a filé entre les doigts. Mais je pense avoir un meilleur sens des priorités. Mes vacances ont été faites de sorties au parc, et j’ai adoré ça. Aller au restaurant aujourd’hui, je trouve ça extraordinaire ! Et j’aime m’extasier devant certaines rues de Montréal. J’ai exploré bien d’autres villes au cours des années, mais je n’ai pas assez exploré la mienne. »
La première saison de Sans rendez-vous atterrira sur l’Extra d’ICI Tout.tv jeudi.
Avec Xavier Dolan
Cet automne, Magalie Lépine-Blondeau tourne dans l’adaptation télévisuelle d’une pièce de Michel Marc Bouchard dans laquelle elle jouait en 2019 au Théâtre du Nouveau Monde, La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé. Elle y retrouve les mêmes acteurs qu’elle côtoyait sur scène, Julie Le Breton, Éric Bruneau et Patrick Hivon. Destinée au Club illico, cette minisérie de cinq épisodes, qui sera également relayée en France sur Canal+, suscite beaucoup de curiosité parce qu’elle marquera les débuts de Xavier Dolan comme réalisateur au petit écran. L’œuvre raconte l’histoire d’une thanatologue (Le Breton) qui retourne dans son village natal pour embaumer sa mère. Magalie Lépine-Blondeau incarne sa belle-sœur qui parle trop.
« Pour les acteurs, c’est un processus intéressant, parce qu’on reprend nos rôles, mais c’est complètement différent, indique la comédienne. Il n’y a pas une réplique qui demeure, mais l’ADN des personnages est vraiment conservé. C’est la première fois que ça m’arrive, de jouer un personnage qui a plusieurs vies différentes à travers d’autres écritures. »
La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé permet à Magalie Lépine-Blondeau de compléter son tour du chapeau avec Xavier Dolan, après Les amours imaginaires (2009) et Laurence Anyways (2011). Et l’actrice continue d’être admirative du travail du cinéaste. « J’ai une confiance absolue en Xavier. Je suis en pâmoison devant son talent, sa maîtrise absolue. »
La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé est attendue en 2022
Magalie Lépine-Blondeau retrouve son grand amour - La Presse
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