Éco Entreprises Québec veut obliger toutes les municipalités à créer des patrouilles pour surveiller systématiquement le contenu des bacs de recyclage. Des élus municipaux dénoncent cette approche.
Le 5 mai dernier, Éco Entreprises Québec a présenté un plan de gestion de la collecte des matières recyclables aux municipalités. Depuis, des négociations ont été entamées avec les villes.
L’organisme, qui a été désigné par le gouvernement Legault pour gérer la collecte sélective à la place des municipalités, souhaite notamment que toutes les villes et tous les villages du Québec surveillent ce que les citoyens mettent dans leurs bacs de recyclage. Ainsi, Éco Entreprises veut s’assurer que les résidents n’y déposent que des matières acceptées dans les centres de tri.
Éco Entreprises Québec veut aussi que des employés municipaux inspectent 20 % des bacs de la ville chaque année. L’organisme exige de plus que ces contrôles résidentiels varient d’une année à l’autre, de telle sorte que tous les domiciles d’une ville auront fait l'objet d’une inspection au moins une fois tous les cinq ans.
Des municipalités dénoncent cette approche du plan que veut mettre en place Éco Entreprises Québec dans le cadre de la modernisation de la collecte des matières recyclables.
À la Ville de Québec, la vice-présidente du comité exécutif, Marie-Josée Asselin, estime que sa municipalité n’a pas les capacités pour faire de telles inspections. On n’a absolument pas les ressources pour faire ça [...] pour se permettre de faire une inspection systématique de 20 pour cent des bacs des citoyens.
Le directeur de la division des matières résiduelles de la Ville de Québec, Steve Cantin, est lui aussi préoccupé par cette patrouille qu’Éco Entreprises veut imposer à sa municipalité : La police du bac, ça va prendre des ressources pour pouvoir faire ça. Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre, c’est sûr que c’est préoccupant.
« Pour moi, ça n'a pas de sens de faire en sorte qu’on inspecte les bacs bleus de nos citoyens. »
J’entrevois vraiment des défis, des enjeux par rapport à la répression. [...] On va devenir les méchants
, précise-t-il. De plus, l’élu de Lanaudière affirme que sa ville n’a pas les ressources financières ni le personnel pour réaliser ces inspections. Si vous voulez qu’on prenne des responsabilités supplémentaires, il faut que les sous viennent avec.
Dans l’entente proposée aux municipalités, Éco Entreprises Québec exige aussi des villes et villages qu'ils remettent un avis aux citoyens qui ont été pris en défaut. Un avis qui pourrait prendre la forme d’une affichette sur le bac, de porte ou déposée dans la boîte aux lettres.
En cas de récidive, Éco Entreprises Québec souhaite que les municipalités prennent des mesures plus sévères contre les citoyens les plus récalcitrants en imposant notamment des amendes, en envoyant une mise en demeure ou en retirant le contenant de la collecte de la résidence.
« On ne veut pas aller là-dedans. Si l’entente nous y entraîne, on ira. On n’a pas le choix [...] mais est-ce qu’ultimement ça va changer pour de bon le comportement du citoyen? On n’est pas certain que ce soit la bonne mesure. »
Le directeur de la division des matières résiduelles de la Ville de Québec, Steve Cantin, doute que de telles mesures portent leurs fruits : On préfère de loin passer par l’éducation et la sensibilisation pour amener les gens à poser le bon geste plutôt que par la coercition. On ne pense pas que le gain qu’on va atteindre avec de la coercition va valoir la peine.
En obligeant toutes les municipalités à surveiller le contenu des bacs de la collecte sélective, Éco Entreprises Québec espère ainsi réduire la quantité de déchets contenus dans les bacs, améliorer la qualité des matières recyclables acheminées dans les centres de tri et augmenter la quantité de matières recyclées.
On est quand même sensible aux préoccupations des municipalités. (...) On comprend que c'est un enjeu à discuter
, affirme Philippe Cantin, vice-président affaires publiques et intergouvernementales d'Éco Entreprises Québec.
Philippe Cantin précise que son organisme a maintenant des cibles de recyclage à atteindre. On a de la reddition de compte, on est imputable pour la performance du système, ce qu’aucune municipalité n’avait à faire jusqu’à présent.
En 2021, la quantité de matières rejetées par les centres de tri du Québec était en hausse. Cette année-là, il y a eu 144 000 tonnes de matières rejetées alors qu’en 2020, les matières rejetées ont atteint 114 000 tonnes.
Certaines municipalités ont déjà des inspecteurs sur leur territoire pour vérifier la contamination des bacs de recyclage, mais cela n'a pas l’ampleur de ce que demande Éco Entreprises Québec et se fait de façon moins intrusive pour les citoyens.
Le président de l’Union des municipalités du Québec affirme qu’il travaille toujours avec Éco Entreprises Québec pour tenter de trouver des pistes de solution et pour que le plan proposé par l’organisme réponde aux préoccupations des villes. Si on impose cette vérification-là, ce sont des coûts directs additionnels qu’on avait convenu qu’on n'aurait pas [...] ce qui avait toujours été discuté depuis le début.
Plusieurs autres mesures contenues dans le plan de modernisation de la collecte sélective proposée par Éco Entreprise Québec préoccupent les mairesses et les maires, dont les pénalités qui pourraient être imposées aux municipalités ayant des taux de contamination importants de leurs matières.
Les municipalités doivent s’entendre avec Éco Entreprises Québec sur les nouvelles modalités de la collecte sélective d’ici le 7 septembre. À défaut de quoi un médiateur sera nommé au dossier.
La réforme du système de la collecte sélective se fera de façon progressive d’ici la fin de 2024.
Des patrouilles pour surveiller les bacs de recyclage - Radio-Canada.ca
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