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Monday, October 24, 2022

Guy Nantel | Comme dans un ring de lutte - La Presse

« Pour moi, la scène, c’est comme un ring de lutte », illustre Guy Nantel, qui aime jouer les méchants, mais qui assure être un bon. « Il y a une convention entre le public et le lutteur. Si, après le gala, tu parles au lutteur comme s’il était encore en personnage, tu te trompes. »

Publié à 7h00
Dominic Tardif
Dominic Tardif La Presse

« Au cours des dernières années, il y a eu beaucoup de controverses autour de ça », dit Guy Nantel, assis dans le salon de sa résidence du Plateau Mont-Royal, quelques semaines avant sa visite remarquée à Tout le monde en parle.

De quelles controverses parle-t-il ? Il commence à y en avoir quelques-unes. L’humoriste parle des controverses entourant les différents degrés d’ironie qui semblent à l’œuvre lorsqu’il s’exprime sur scène. Dernier cas de figure en date : Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de dire…, son nouveau spectacle, qu’il présentera aux médias mardi, mais que La Presse a vu en rodage à Cowansville, fin septembre.

Comme ce titre le suggère, l’ex-aspirant à la direction du Parti québécois consacre une bonne partie de ce sixième solo à dresser le bilan de sa course. En renouant avec un alter ego qui passe constamment de la condescendance à l’autodérision, Nantel se moque ainsi des conspirationnistes, des personnes âgées (nombreuses au sein de son public), des végétaliens, des wokes, de Justin Trudeau, de René Lévesque ainsi que, brièvement, du collègue Marc Cassivi.

Et si personne n’oserait conclure qu’il est sérieux lorsqu’il suggère que se débarrasser des baby-boomers pourrait contribuer pour le mieux à chasser la catastrophe écologique qui guette la planète, le réel regard qu’il pose sur certaines autres de ses cibles semble plus équivoque. Pense-t-il vraiment tout ce qu’il dit au sujet des végétaliens, pourtant pas le groupe le plus nocif pour notre vie en commun ?

« Je trouve ça paradoxal, parce que les gens qui allument ces controverses-là sont les mêmes qui vont dire qu’il faut faire confiance à l’intelligence du public. C’est mange-marde de dire ça d’un côté, mais de dire de l’autre qu’il faut tout le temps désamorcer les gags », explique-t-il. Interlocuteur courtois, presque doux, notre hôte peut aussi s’enflammer en une seconde.

Moi, j’ai confiance dans le fait que les gens comprennent que c’est un personnage de scène que je joue, que c’est souvent de la pure provocation. Ultimement, la seule affaire qui compte pour moi, c’est : qu’est-ce qu’une personne raisonnable penserait de ça ?

Guy Nantel

Caricaturiste et peintre

Que Guy Nantel ait pris parole en tant que citoyen, sans le paravent de l’humour, pendant la course à la direction du PQ, et qu’il continue de le faire régulièrement à l’antenne de QUB Radio, ne brouille-t-il pas les cartes ?

C’est qu’il existe deux Guy Nantel, fait-il valoir, en décrivant son travail comme celui d’un caricaturiste (son métier d’humoriste), à qui il arrive de peindre « des vraies toiles », comme lorsqu’il participe à l’émission Le monde à l’envers de Stéphan Bureau. « Je ne comprends pas que certaines personnes ne comprennent pas le niveau, qui est pour moi d’une grande évidence. Si j’avais un chapeau, une perruque et des fausses dents, tout le monde comprendrait, mais c’est la même affaire. Sur scène, on s’en fout de la véritable opinion de Guy Nantel. L’important, c’est ce qui est plus payant pour le personnage. »

Un personnage de « gros colon », aux antipodes de l’homme qu’il est réellement, plaide celui qui a remporté en 1994 La course destination monde et qui, en 54 années de vie, a visité une soixantaine de pays.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Guy Nantel

Ce qui tient à ses yeux de la convention comique limpide échappe manifestement à nombre de ses contempteurs, lui fait-on remarquer. « Parce que plein de gens sont cons. Tu l’écriras en gros. Il y a plein de niaiseux qui, juste pour se montrer vertueux, ne font plus la distinction entre un personnage et la personne qui l’incarne. On vit une immense perte de repères. »

À droite ou à gauche

C’est au milieu de la décennie 2000, en tant que monologuiste en résidence à l’émission Il va y avoir du sport de Télé-Québec, que ce fils de chauffeur de taxi, né à Montréal, rencontre réellement son public, après avoir beaucoup bourlingué dans les bars.

D’abord célébré par une certaine intelligentsia parce qu’il participait à la résurrection de l’humour politique, Guy Nantel aura été au cours des dernières années au cœur de plusieurs polémiques, notamment à cause d’une vidéo mise en ligne afin de promouvoir son Livre offensant, dans lequel il débattait avec l’autrice Lili Boisvert et l’humoriste Anne-Marie Dupras de culture du viol, une expression qui, selon lui, contribue « à diviser plutôt qu’à régler des problèmes ».

Pour lui, « c’est une évidence », les médias québécois tendent à gauche. Mais Guy Nantel, lui, est-il de gauche ou de droite ? « Je sais que ça achale le monde, mais je suis un gars de centre », tranche-t-il, tout en précisant que son personnage de scène « est plus à droite » que lui.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Guy Nantel

Ben du monde m’a dit que j’avais changé, mais je n’ai pas cette impression-là. J’ai l’impression que le monde a changé autour de moi. Mais au Québec, à partir du moment où tu critiques les seuils d’immigration, par exemple, tu passes pour quelqu’un de droite.

Guy Nantel

Guy Nantel se définit essentiellement comme un « gars pragmatique, rationnel ». Et l’image que certains se font de lui, même parmi ceux qui l’apprécient, serait tordue par certains a priori. « Le producteur de l’émission de Stéphan Bureau me disait l’autre jour : “Je n’en reviens pas que tu habites sur le Plateau. Pour moi, tu étais un banlieusard de droite.” Mais pourquoi vous pensez ça ? C’est comme si on pensait que Jean-Pierre Masson était vraiment gratteux parce qu’il jouait Séraphin. »

Qui est Guy Nantel ? « Je suis un gars ordinaire qui, comme la masse critique silencieuse, ne pense pas dans les extrêmes. Mais des gens tracent à mon sujet le portrait qui les arrange. Les gens sont immatures dans le débat politique. On n’est pas capable de discuter de problèmes sociaux sans entrer dans l’émotion. On est tous pour la vertu. C’est juste que tout le monde n’adhère pas aux mêmes solutions pour arriver à ce qu’il considère comme le bien commun. »

Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de dire…, le 25 octobre à la Place des Arts

Péquiste, malgré tout

  • Guy Nantel

    PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

    Guy Nantel

  • Guy Nantel

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

    Guy Nantel

  • Guy Nantel lors de la course à la direction du Parti québécois

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

    Guy Nantel lors de la course à la direction du Parti québécois

Un des meilleurs passages du nouveau spectacle de Guy Nantel consiste en une éviscération en règle des instances plutôt byzantines du Parti québécois. S’il demeure fidèle à la formation souverainiste, pour laquelle il a voté le 3 octobre dernier, le candidat défait confie avoir été déçu de l’accueil qu’on lui a réservé lors de la course à la direction de 2020, alors qu’il avait pourtant été pressenti par des ténors péquistes (qu’il préfère ne pas nommer). « On entend souvent que pour quelqu’un qui n’est pas de l’establishment, c’est dur de faire sa place dans un parti, et j’ai compris ce que ça signifiait. On aime dire que la chose politique appartient à tout le monde, mais j’ai été bombardé de commentaires de souverainistes qui disent que je n’étais qu’une distraction, parce que je suis humoriste. C’est ça qui m’a le plus dérangé. »

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